jeudi 25 décembre 2014

Les aventuriers de l'Aurient perdu - un scénario Disque-Monde

Comme promis, pour Noël, je vous offre un scénario, puisque c'est le type d'article qui a remporté le vote. Ce scénario se déroule dans l'univers du Disque-Monde, avant les événements décrits dans Les tribulations d'un mage en Aurient. Comme il s'agit de ma campagne personnelle, il est adapté aux PJ (personnages des joueurs), il nécessite donc probablement un peu de travail pour l'adapter à d'autres PJ.


Marcus Fermette, membre de la guilde des Archéologues et autres pilleurs de tombes, a découvert en recoupant divers rares récits qu'un trésor fabuleux se trouverait sous l'une des pyramides de l'empire agatéen. Il pourrait en effet lui permettre de faire une publication sur les liens entre la civilisation agatéenne et Howonda, déjà tous deux producteurs de thé. Comme en plus, ce trésor serait d'un plus bel effet dans le musée d'Ank-Morpok, il décide de s'y rendre, accompagné d'un groupe d'aventuriers recrutés sur divers critères (connaissance de l'agatéen, de l'archéologie ou bon chanteur...).


Les PJ font leurs bagages (penser à leur demander ce qu'ils prennent) et font leurs préparatifs, puis prennent un navire en direction de Bès Pélargic. À peine arrivés, Marcus décide de sortir immédiatement de la ville pour se diriger vers la tombe car le temps presse : le navire repart dans 6 jours, et il y a 2 jours de trajet à pieds jusqu'à la tombe. Il est tellement obstiné qu'il n'écoute aucune suggestion : ni prendre de la nourriture (« on se nourrira sur place »), ni demander des autorisations administratives (« hein ? »), ni chercher un moyen de locomotion plus rapide (« s'ils n'en ont pas dans ce pays de barbares, on aura perdu du temps »). Chacun a son propre sac avec son équipement de départ. 

La ville de Bès Pélargic est encore en vue quand ils croisent des soldats agatéens, qui demandent à Marcus son permis de circuler. Les soldats ne se préoccupent pas du tout des autres, si l'un d'eux fait mine d'intervenir (autrement que pour faire l'interprète), ils se mettent à l'insulter (« Triste vermisseau tout juste digne à ramper dans la poussière ! », « Sac de poisson pourri !») et un connaisseur de l'Aurient (ou le geste d'une main vers une arme aiguisée, ou un peu de bon sens ou de sens du danger) devrait convaincre le PJ de se prosterner – un PJ particulièrement chanceux pourrait remarquer juste à ce moment que son lacet est défait et se « prosterner » involontairement.  Démuni (bien sûr!) de tout papier, Marcus est emmené. Il a juste le temps de lancer son carnet de notes à un PJ, en lui demandant « cherche ! » avant qu'une main ne se pose sur sa bouche pour l'empêcher de continuer à parler.

Le carnet de Marcus
À partir de là, 2 options s'ouvrent aux PJ : secourir Marcus, ou tenter de trouver le trésor par eux-même. Mais quoi qu'ils fassent, le navire part dans 6 jours (sauf sabotage inopiné, enlèvement du capitaine, ou autre méthode sournoise pour le faire rester plus longtemps).


Le trésor

Se rendre à la tombe

Avant de partir, les PJ peuvent tenter d'obtenir des permis de circulation pour se rendre à la pyramide. Il existe un bureau des permis, où ils peuvent obtenir un rendez-vous immédiat.
On leur offre du thé en attendant (s'ils acceptent, compter une heure minimum : ils ont choisi une  cérémonie du thé). Ensuite, on leur demande avec insistance où ils comptent se rendre et pour quoi faire (les laisser se dépêtrer dans leurs mensonges, sauf s'ils croient que piller des tombes est une activité acceptable quand on arrive en pays étranger). On leur pose aussi quelques questions très importantes, comme « êtes-vous venu pour semer la sédition ? », « avez-vous visité une ferme au cours des 6 derniers mois ? », « vénérez-vous l'empereur comme il se doit ? », « comptez-vous publier un livre ? ». Puis on les congédie en leur indiquant que leur réponse leur arrivera dans 2 jours. S'ils préfèrent contrefaire les papiers, cela leur prendra autant de temps.

Les PJ peuvent également décider de partir immédiatement sans papier pour gagner du temps, le voyage se passera sans encombre s'ils se planquent à chaque fois qu'ils voient des soldats.
Ils peuvent également utiliser ces 2 jours pour tenter de libérer Marcus et trouver un stratagème  pour avoir quand même le temps d'aller piller la pyramide, comme par exemple louer des chevaux ou retarder le navire (mais les supplications n'y feront rien, bien au contraire !).

S'ils tentent de louer des chevaux, soudoyer un  fonctionnaire ou autre, ils réaliseront qu'ils ont comme un problème d'argent : l'or ne vaut pas grand-chose en Aurient, et ils n'ont pas de papier-monnaie, sauf éventuellement un personnage agatéen. Fort heureusement pour eux, leur statut d'étranger leur vaudra la sympathie de Hang (selon les choix des joueurs, qui sera le loueur de chevaux, un fonctionnaire, voire un malfrat) qui leur rendra service gratuitement en échange de quelques informations sur Ankh-Morpok et d'une confirmation de la véracité des propos trouvés dans le livre Ce que j'ai fait pendant mes vacances. (« c'est vrai qu'on peut acheter du pâté en croûte qui rassasie tellement qu'on n'y revient plus ? », « qu'on peut insulter un garde sans perdre la tête ? », « et que les rues d'Ankh-Morpok sont quand même sûres ? »).

La tombe

Il s'agit d'une pyramide à degrés de faible hauteur (pour ne pas voir au-dessus de la muraille – oui elle est loin, mais le Disque-Monde est plat). Aucune entrée n'est visible, mais le carnet contient avec le plan de la pyramide les mots « Entrée à trouver », suivis de cette phrase : « C'est là où on cherche l'ordre qu'on trouve le chaos en plus grande abondance. Le chaos parvient toujours à vaincre l'ordre, car il est mieux organisé. »
Un PJ lettré avec un peu d'humanités (ou agatéen) devrait reconnaître une citation de Ly Tin Wheedle  (ce sera aussi le cas des autres citations/énigmes). Marcus a également noté « Évident ! Lieu chaotique à trouver sur la tombe, à l'extérieur. »
Les PJ devraient chercher le chaos (pour trouver l'ordre), et effectivement, ils vont trouver à la base de la pyramide un endroit où les pierres plus ou moins régulières sont remplacées par des cailloux.
Peut-être essaieront-ils de trouver comment entrer en s'aidant de la deuxième citation : « Un âne peut faire le travail d'un bœuf quand il y a pénurie de chevaux ». Après environ 2h  d'effort (ajouter ou retirer 15 min par marge de réussite/échec au jet de force – si un seul creuse, le temps est doublé, il n'y a que 2 places mais si les PJ se relaient, ils seront moins fatigués), ils se rendront compte que les cailloux étaient destinés à combler une pierre abîmée par un précédent pilleur de tombes (marques de pioche sur la pierre). Les PJ vont devoir à nouveau chercher, et finiront par découvrir que la pierre qui scelle le haut de la pyramide est d'un seul bloc et qu'elle est particulièrement bien taillée, un parallélépipède parfait, l'ordre à l'état pur...
Il est temps de savoir comment déplacer cette *** de pierre. Là, ça devrait être facile : il y a de nombreuses gravures sur cette pierre, mais aucune de cheval... et une seule d'âne ! La pierre coulisse, il est temps d'entrer dans les entrailles de la tombe.
Il est temps aussi de penser aux torches... si les PJ n'en ont pas prévu et n'ont pas de sort de lumière, il sera temps d'aller voler de quoi s'éclairer au village voisin.

Arrivés en bas, c'est une grande salle. Qui a visiblement été occupée récemment, et l'est encore régulièrement : restes de foyer, récipients de nourriture (avec un peu de riz qui reste). Des slogans sont écrits sur les murs (en agatéen) : « Décès regrettable sans souffrance excessive aux forces de l'oppression ! » « Droit de propriété des moyens de production » « Longue existence à l'armée Rouge ». Plusieurs passages y débouchent, et il est temps de s'atteler à l'énigme permettant de découvrir son chemin.
« L'imbécile qui chante fait plus de bruit que l'intellectuel qui se tait ». C'est cette énigme qui a poussé Marcus à prendre un chanteur dans son équipe (à voir si il se vexe pour « l'imbécile »). Laissez-les se prendre la tête à deviner où et comment pousser la chansonnette (et accessoirement laquelle). La réponse sera probablement trouvée par hasard : un magnifique la 440 au centre exact de la pièce, par un phénomène acoustique surprenant, provoque un do dièse (277,18) en retour depuis le bon passage. En cas de mauvaise supposition, les passages mauvais sont piégés (repérable par un piégeage avec un malus de 5 – ce sont de très bons pièges).
1er piège : des fléchettes qui sortent de petites fentes dans le mur. Seul le PJ en tête est touché, et il se prend 1d3 flèches (pouvant être minorées en cas de Sens du danger ou Chanceux). La première est enduite d'un poison qui le rend moche. La seconde d'un poison qui lui donne mal au ventre et donne à tout ce qu'il mange un goût amer. La troisième d'un poison paralysant qui le bloque sur place. Heureusement, les effets s'estompent avec le temps (compter 1 heure +- 5min par marge de réussite/échec au jet de SAN pour la paralysie, pour les 2 autres c'est 1 jour en cas d'échec de résistance, rien sinon), mais ça ne donne pas envie de se les prendre (d'ailleurs, si la paralysie s'applique, il faudra aller chercher le PJ, au risque d'être soi-même empoisonné...). Ah oui, paralysé ne signifie ni inconscient, ni incapable de crier, ce sont les membres qui ne bougent plus.
2d piège : un mur de flammes. Non seulement les PJ ne peuvent pas passer, mais ils sont bien cramés (leur faire 1d6 PV, moitié s'ils ont réussi un jet DX), ça devrait les pousser à réfléchir un peu.

Enfin, les PJ vont se trouver au cœur de la tombe en question. Et là se trouve le « fabuleux » (pour un pilleur archéologue) trésor : une statuette. Les plus observateurs remarqueront sûrement que ses yeux sont des pierres précieuses. Cependant, il y a tout un mécanisme dans la chambre mortuaire dont ils devraient se demander l'usage. Et ça a l'air de commencer au niveau du support de la statuette. La citation correspondante est : « La livre de plumes d'oie ne pèse pas plus lourd que la livre de fientes de chauve-souris ». À moins que tous les joueurs ne soient des analphabètes en matière de cinéma, ils devraient piger qu'il faut remplacer la statuette par un poids équivalent pour ne pas déclencher le piège.


Laissez-leur se prendre la tête (ils ignorent le poids de la statue – quoiqu'ils peuvent penser qu'elle pèse une livre, mais une note de Marcus devrait semer le doute sur la correspondance avec la livre morporkienne) et échouer lamentablement (ou réussir brillamment en atteignant une chance sur un million). En cas d'échec, ils ont le temps de voir le mécanisme se mettre en marche, genre une petite bille qui descend d'un rail, qui fait tomber des dominos, qui déclenchent une autre bille, ce qui leur laisse largement le temps de fuir de la pièce (voire, s'ils sont très futés pour des héros du Disque-Monde, de choper la bille au passage pour désamorcer le piège).

Option : un peu de politique et d'humanitaire

En sortant (à une vitesse plus ou moins importante) de la tombe, les PJ vont tomber dans la salle principale sur une réunion de l'Armée Rouge (qu'il faudra peut-être évacuer dare-dare). Ce sont des enfants, uniquement des enfants, qui parlent un peu le morporkien, surtout pour des slogans comme « Un homme, une voix ». Leur problème, c'est que les quelques adultes parmi eux ont été identifiés et pris par les autorités. Les enfants pourront vaguement expliquer qu'ils doivent être dans « la cellule inconfortable pour quelques années ». Si les PJ veulent plus de détail ou cherchent à les rassurer, ils devraient entendre parler de verre pilé et de fin de peine garantissant l'absence de récidive.
Accessoirement, s'ils vont au village des enfants, le dit village aura disparu (seules un peu de cendre et l'absence de végétation témoigneront de son ancien emplacement).
À eux de gérer ces gamins, éventuellement en les faisant sortir du pays (ou en les emmenant à Hang).


L'administration agatéenne


S'ils ont d'abord exploré la tombe et n'ont pas au moins une journée avant le départ du navire, ils devront choisir entre sauver leur professeur ou rentrer au plus vite.
On leur indiquera facilement le bureau des démarches de libération de prison.
La première chose qu'on leur demandera, c'est leur permis de circuler. S'ils n'en ont pas, ils vont devoir faire les démarches pour en obtenir un (voir Se rendre à la tombe - ce scénario ressemble à l'administration agatéenne). Si c'est déjà fait et qu'il n'ont pas encore le permis, ils devront se rendre à nouveau au bureau des permis pour obtenir un justificatif provisoire de démarche en cours.
Une fois munis de cette attestation (ou du permis), le bureau des démarches de libération de prison leur donnera un justificatif leur permettant de rencontrer, dans l'heure qui vient, le juge aux affaires d'emprisonnement pour plaider leur cause.  Après quasiment une heure d'attente, le juge regardera leur justificatif et leur signalement qu'il manque le tampon du bureau  30  tête de chien (ils ont des idéogrammes, pas des lettres). Une fois le tampon obtenu, il sera trop tard pour voir le juge, ils devront repasser dans l'après-midi (ou le lendemain matin). Enfin, ils pourront plaider leur cause auprès du juge. Celui-ci, après les avoir entendu, leur demandera « mais il est agatéen ? ». Hop ! Il ne fallait pas s'adresser à lui, mais au bureau des affaires étrangères.
Au bureau des affaires étrangères, on se moque de leurs papiers, mais ils doivent répondre à bien des questions comme « mais vous aviez un permis, vous ? » et « mais pourquoi a-t-il quitté le navire ? » et même « Que venez-vous faire dans notre pays ?».  Enfin, on leur fournira un formulaire à remplir, qui permettra à Laurent de passer devant une commission (le jour du départ du navire) pour être éventuellement libéré. Ce formulaire demande :
  • un haiku sur la liberté
  • une dissertation sur la question : Le caillou dans la rivière est-il plus libre que l'eau qui s'écoule autour de lui ?

Avec une demi-journée supplémentaire de tracas administratifs (administration, étiquette, ou à défaut volonté), ils pourraient réussir à le voir, tout ça pour constater qu'il est bien traité et qu'il tient à ce qu'ils aillent chercher le trésor en son absence.
Si les PJ ne passent pas par cette étape, Laurent sera bien sûr libéré, mais pas avant le départ du navire...

Conclusion

Le navire repart en direction d'Ank-Morpork, les cales pas très pleines, au contraire de la poche du capitaine. Les PJ sont-ils dedans ? Et Marcus ?

Et le truc de pro du MJ : écrivez le carnet de Marcus et lancez-le aux PJ au moment adéquat, c'est bien plus fun que de le décrire.

Yoda

Les images sont tirées :
  • du film Le père porcher
  • du carnet de Marcus (je pose cette image dans le domaine public, c'est cadeau de Noël !)
  • du film Les aventuriers de l'arche perdue (et dénichée sur lesjoiesducode)
  • de la bande dessinée Les 12 travaux d'Astérix

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